Les dernières heures – Minette Walters

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Livre reçu dans le cadre d’une opération Babelio/Masse Critique. C’est l’envoi d’un livre en service presse en l’occurence par les ed. Robert Laffont, mais en échange d’une chronique. J’aime beaucoup faire ça, parce que c’est souvent des hasards, et là c’est un livre vers lequel, je pense, je ne serais pas allée ordinairement.

Je n’ai jamais lu de sagas historiques, ça ne m’a jamais attirée, et je n’ai souvenir que de très anciennes. Je n’ai jamais été spécialement portée par les romans historiques non plus.

À part le magnifique roman de l’an dernier de Stefan Hertmans, chronique que j’ai faite, lien ici :

Le coeur converti – Stefan Hertmans

Alors je suis rentrée dans ce livre, tellement j’étais étonnée qu’une auteure prolifique de romans policiers contemporains se mette à raconter l’Histoire du Dorset au Moyen-Âge, ça me tentait bien.

Le résumé éditeur :

« Mois de juin de l’an 1348 : une épidémie monstrueuse s’abat sur le Dorset et décime peu à peu les habitants. Nobles et serfs meurent par milliers dans d’atroces souffrances.
Quand la pestilence frappe Develish, Lady Anne a l’audace de nommer un esclave comme régisseur. Ensemble, ils décident de mettre le domaine en quarantaine pour le protéger »

L’époux de Lady Anne, Sir Richard de Develish, vient de partir à 4 jours de voyage pour rencontrer le futur fiancé de leur fille, Lady Eleanor de Develish, 13 ou 14 ans (pas clairement dit)Il part avec l’or de la dot, il est accompagné par les soldats de sa garde, et le chef de ceux-ci, Gyles, un homme instruit, bien plus que Sir Richard qui ne sait ni lire ni écrire. De plus il parle aussi bien anglais que français, très important car à l’époque, les Normands étaient au pouvoir, d’ailleurs Sir Richard est normand, mais Lady Anne, son épouse, est saxonne.

Pendant qu’il est parti, dans Devilish, grand manoir où vivent Lady Anne et sa pimbêche de fille, Lady Eleanor, Lady Anne impose un serf, jeune homme non seulement serf, mais bâtard de la famille Thurkell, au service de la famille comme Régisseur du Domaine. Il y a là 200 personnes, serfs, domestiques liés à vie à leurs maîtres, de générations en génération.. la nomination de ce grand gars cultivé, sachant lire, écrire, simple et modeste mais respecté, cause quelques troubles.

Mais soudain l’on s’aperçoit que le prêtre de l’église du domaine passe ses journées à l’extérieur du domaine, dans les chaumières des serfs, et revient, épuisé, mais au troisième jour il ne revient pas. Une vieille serve vient au domaine et explique aux guetteurs puis à Lady Anne que grand malheur arrive, les gens meurent d’un mal horrible en trois jours, les gens sont pris de douleurs et de fievre, présentent des bubons horribles, leur sang devient noir : elle est venue prévenir : le prêtre dit que c’est le Mal Noir, la Mort Noire envoyée par Dieu. Il faut prier, se repentir ! 

Lady Anne et Thaddeus prennent tout en main, Anne a été élevée dans un couvent, elle y a appris l’importance de la propreté, du lavage, de faire des latrines à part et ne rien jeter par les fenetres comme l’on fait trop souvent. Elle connait aussi les herbes qui soignent, elle va s’en occuper, de cette maladie. Elle ne croit pas, en elle-même, que c’est  Dieu qui envoie cette maladie. Décision est prise de vite construire des logements pour les serfs à l’intérieur du domaine, fait rentrer les provisions qui restent, les moutons, et le domaine est fermé. Ils vont vivre en autarcie, tant que le danger de contagion rôde. On dit que la maladie vient du Sud de l’Angleterre, amenée par des marins, elle tue les gens en trois jours, elle a envahi le Dorset tout entier. Les voyageurs et famillent qui passent sur la route, expliquent qu’ils fuient vers le Nord. 

On vit ici dans le Moyen-Âge, l’esclavage des serfs qui peuvent être tués par leur maitre n’importe quand, la saleté et les immondices, les famines dues aux impots et les cultures qui doivent êtres donnés aux maitres, l’absence de soins et de medecine, aucune instruction, la peur de Dieu, du Diable, la peur de la mort, les gens qui ne vivent jusque 35 ans en général… et par contraste le système mis en place par Lady Anne, 28 ans, de réaliser des installations de propreté, des latrines, des soignantes, de donner des leçons de lecture aux serfs qui le veulent, et à tous les enfants, de bien nourrir ses serfs et employés, les respecter, et par retour les serfs la respectent, respectent son humanité. Tout ça dans le dos de son mari, monstrueux et inculte. Alors qu’à cette époque les Maîtres DEVAIENT se faire crandre, seul moyen pour qu’ils vivent richement, sans rien faire de plus que de ripailler et profiter de la vie.

Un jour, Thaddeus le jeune serf (ça m’a fait rire, dans le texte on lit souvent « le grand serf », même si ce n’est pas écrit comme dans la chanson), donc l’homme de 28 ans s’en va,  avec quatre  plus jeunes, pour voir ce qui se passe, et promet qu’ils reviendront dans 15 jours. Ils vont visiter les villages et domaines alentours. Alors qu’ils ne sont jamais sortis du domaine et du petit village des serfs. Ils vont se confronter à l’inconnu, la nature, comment se repérer, où aller, ramener des provisions pour les 200 personnes qui commencent à manquer de nourriture..

Les sujets beaucoup plus analysés qu’évoqués sont le rôle de la femme, dans le cas de Lady Anne, se retrouvant maîtresse d’un grand domaine, l’instruction donnée pour tous, car instruits on vit mieux, on avance ;  l’omniprésence de la religion que les prêtres et les évêques prônent, qui fait peur, et qui dit que tout le monde doit obéir. Lady Anne est une femme progressiste, qui peu à peu prend des responsabilités dans la gestion des problèmes de tout ordres dans ce domaine refermé sur lui-même, réfute les idées à son avis mensongères que le prêtre remplaçant assène tous les jours, parle presque et de plus en plus d’égale à égal avec les chefs qu’elle a nommés, tout en protégeant les gens sous sa responsabilité. Superbe ambiance, haletante car l’on suit tous les efforts de cette femme face à sa fille, au prêtres, à la faim, à la guerre qui menace, aux invasions qui vont arriver, à la Pestilence qui tue. 

D’un autre côté on suit Thaddeus et ses 4 jeunes compagnons, ados, serfs aussi, qui vont apprendre à survivre sans rien, sans armes, sans vivres, dans la nature, la forêt, la nuit, les chaumières pestilentes qu’il va falloir brûler, les cadavres dans les rues, les villages fantômes portant la maladie, les chiens sauvages… pour trouver à manger pour la communauté. Ils ne comprennent pas, personne ne comprend comment frappe la « pestilence », alors ils vont peu à peu réfléchir au moyen de l’éviter, aux moyens de faire leur expédition sans risque, à COMMENT se fait-il que soudain on est malade.

C’est haletant. C’est prenant. C’est merveilleux et authentique, l’auteure ayant beaucoup étudié l’histoire du Dorset à cette époque, et lu toutes les archives. Les personnages sont tous attachants, même Éléanor la pimbêche, on tourne les pages sans pouvoir arrêter. Et lorsque le livre se termine sur des suspenses en cours, et qu’il est écrit « à suivre », moi je dis OUI, je suis. Je suivrai. J’adore. 

Traduit de l’anglais par Odile Demange.

Les Dernières Heures – Minette Walters ed Robert Laffont, 525 pages, 22,50, date de sortie : 19 septembre 2019

11 commentaires

  1. Bonjour.
    Ce titre m’a également transporté. J’étais rivé au livre des heures durant, tant il est captivant. À le fin l’expression à suivre, m’a mis un coup au moral. Et depuis 7 ou 8 mois j’attends avec impatience le deuxième volume. Quand arrivera t il enfin ?

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